En matière de bail commercial, la liberté contractuelle trouve aussi à s’appliquer. Ainsi, hormis les aspects caractéristiques du statut des baux commerciaux qui s’imposent aux parties (tels que le droit au renouvellement ou la durée initiale de 9 ans minimum), le bailleur et le preneur bénéficient d’une certaine marge de manœuvre pour fixer les clauses du bail. C’est pourquoi il faut être particulièrement attentif lors de la rédaction du contrat.
Les sept pièges à éviter avant de signer un bail commercial
1. Quels locaux et quelles activités peuvent être l’objet d’un bail commercial ?
Le bail commercial peut porter sur tous types de locaux (magasin, bureau, usine, entrepôts, etc.) mais à la condition qu’y soit exploité un fonds de commerce, d’industrie ou artisanal (article L.145-1).
C’est donc la nature de l’activité exercée qui va impliquer l’application du statut des baux commerciaux.
Nota Bene : les parties peuvent volontairement choisir d’appliquer le statut des baux commerciaux lorsque le locataire exerce une activité civile. On parle alors de soumission volontaire au statut des baux commerciaux.
2. Bail commercial, bail dérogatoire et convention précaire : attention aux faux amis !
Le bail commercial, d’une durée d’au moins neuf ans, ne doit pas être confondu avec deux autres contrats : le bail dérogatoire et la convention d’occupation précaire.
Le bail dérogatoire, prévu par l’article L.145-5 du code de commerce, permet aux parties de déroger, lors de l’entrée dans les lieux du locataire, aux dispositions du statut des baux commerciaux à la condition que la durée totale du bail ou des baux successifs ne soit pas supérieure à 3 ans.
Quant à la convention d’occupation précaire, définie par l’article L. 145-5-1 du code de commerce, elle consiste en une autorisation d’occuper les lieux en raison de circonstances particulières et indépendantes de la seule volonté des parties. L’occupation précaire est ainsi possible dans l’attente de futurs travaux d’aménagement ou de démolition, d’une expropriation, de la signature d’un acte de vente après la signature d’une promesse de vente etc.
La distinction est d’importance car contrairement au bail commercial, le bail dérogatoire et la convention d’occupation précaire sont exclus du champ d’application du statut des baux commerciaux. En principe, les dispositions protectrices (pour le locataire) des baux commerciaux (droit au renouvellement, durée de bail de 9 ans minimum, plafonnement du loyer etc.) ne sont donc pas applicables.
3. Comment faire l’état des lieux ?
L’article L.145-40-1 du code de commerce dispose que lors de la prise de possession des locaux par le locataire, un état des lieux est établi contradictoirement par le bailleur et le locataire. L’état des lieux est joint au contrat de location ou, à défaut, conservé par chacune des parties.
Si l’état des lieux ne peut être établi dans les conditions prévues ci-dessus, il est établi par un huissier de justice, sur l’initiative de la partie la plus diligente, à frais partagés par moitié entre le bailleur et le locataire.
Attention : le bailleur qui n’a pas fait toutes diligences pour la réalisation de l’état des lieux ne peut se prévaloir de l’article 1731 du code civil. Cet article 1731, favorable au bailleur, dispose que « s’il n’a pas été fait d’état des lieux, le preneur est présumé les avoir reçus en bon état de réparations locatives, et doit les rendre tels, sauf la preuve contraire ».
4. Quel montant pour le loyer ?
Le code de commerce ne règlemente pas le montant du loyer initial. En conséquence, lors de la signature du bail, les parties fixent librement le montant du loyer.
En revanche, la révision du loyer, elle, est strictement réglementée. De manière schématique, on peut distinguer trois cas.
Premier cas : le bail prévoit que le loyer sera révisé tous les trois ans. En principe, cette révision s’effectue (très généralement à l’initiative du bailleur) dans les conditions suivantes : la majoration (ou la diminution) de loyer « ne peut excéder la variation de l’indice trimestriel des loyers commerciaux (ILC) ou de l’indice trimestriel des loyers des activités tertiaires (ILAT) intervenue depuis la dernière fixation amiable ou judiciaire du loyer » (article L.145-38 du code de commerce).
Deuxième cas : le bail comporte une clause d’échelle mobile (ou clause d’indexation) qui prévoit que le loyer sera indexé sur un indice déterminé. Dans ce cas, le loyer pourra être révisé (sans attendre le délai de trois ans ci-dessus) « chaque fois que, par le jeu de cette clause, le loyer se trouve augmenté ou diminué de plus d’un quart par rapport au prix précédemment fixé contractuellement ou par décision judiciaire » (article L.145-39 du code de commerce).
Toutefois, pour éviter des hausses excessives de loyer, ces clauses d’indexation sont strictement encadrées : « la variation de loyer qui découle de cette révision ne peut conduire à des augmentations supérieures, pour une année, à 10 % du loyer acquitté au cours de l’année précédente » (idem).
Troisième cas : le loyer comprend une partie fixe et une partie variable indexée par exemple, sur le chiffre d’affaires du locataire (clause-recettes). Dans ce cas, lorsque ce chiffre d’affaires atteint un certain montant déterminé par le bail, on applique à ce montant un pourcentage, variable selon les secteurs d’activité. Cette révision du loyer échappe à la règle du plafonnement en fonction de l’indice Insee du coût de la construction.
Dans tous les cas, le bail commercial doit préciser la périodicité du paiement du loyer (mensuel ou trimestriel) et s’il est payable à terme échu (c’est-à-dire à la fin du terme, mois ou trimestre) ou à terme à échoir (c’est-à-dire au début du terme).
5. Quel dépôt de garantie ?
L’article L.140-40 du code de commerce dispose que « les loyers payés d’avance, sous quelque forme que ce soit, et même à titre de garantie, portent intérêt au profit du locataire, au taux pratiqué par la Banque de France pour les avances sur titres, pour les sommes excédant celle qui correspond au prix du loyer de plus de deux termes ».
En d’autres termes, le dépôt de garantie ne doit pas excéder deux termes de loyers. A défaut, le bailleur a l’obligation de rémunérer ce dépôt de garantie par des intérêts versés au preneur.
6. Attention aux charges !
Avant la loi Pinel de 2014, en application du principe de liberté contractuelle, le bailleur pouvait mettre à la charge de son preneur l’intégralité des charges. Depuis 2014, cette pratique n’est plus possible car la répartition des charges entre les parties est davantage encadrée.
Ainsi, le code de commerce définit une liste de cinq catégories de charges qui ne peuvent plus être imputées au locataire. Il s’agit :
- des dépenses relatives aux grosses réparations mentionnées à l’article 606 du code civil ;
- des dépenses relatives aux travaux visant à remédier à la vétusté ou à mettre en conformité avec la réglementation le bien loué, dès lors qu’ils relèvent des grosses réparations mentionnées à l’article 606 du code civil ;
- des impôts, notamment la contribution économique territoriale, taxes et redevances dont le redevable légal est le bailleur ou le propriétaire du local (toutefois, peuvent être imputés au locataire la taxe foncière et les taxes additionnelles à la taxe foncière ainsi que les impôts, taxes et redevances liés à l’usage du local ou de l’immeuble ou à un service dont le locataire bénéficie directement ou indirectement) ;
- des honoraires du bailleur liés à la gestion des loyers du local faisant l’objet du bail ;
- des charges, impôts, taxes, redevances et du coût des travaux relatifs à des locaux vacants ou imputables à d’autres locataires.
7. La sous-location : attention au ménage à trois !
L’article L.145-31 du code de commerce dispose que « sauf stipulation contraire au bail ou accord du bailleur, toute sous-location totale ou partielle est interdite.
En cas de sous-location autorisée, le propriétaire est appelé à concourir à l’acte ».
En d’autres termes, la sous-location est en principe interdite. Toutefois, la loi permet aux parties de déroger à cette interdiction. Ainsi, le locataire peut négocier à la signature une clause autorisant la sous-location, ce que le bailleur peut refuser.
Nota Bene : la sous-location irrégulière justifier la résolution du bail.
En cas de défaut de paiement du locataire principal, le bailleur principal peut se retourner contre le sous-locataire. Mais dans ce cas, le sous-locataire n’est tenu envers le bailleur que jusqu’à concurrence du prix de sa sous-location.
Lorsque le loyer de la sous-location est supérieur au prix de la location principale, le propriétaire a la faculté d’exiger une augmentation correspondante du loyer de la location principale.
Reste l’épineuse question du droit au renouvellement, qui concerne les rapports entre trois personnes : le bailleur, le locataire principal et le sous-locataire.
En cas de sous-location totale, le locataire principal ne bénéficie pas du droit au renouvellement ; en cas de sous-location partielle, le locataire principal peut bénéficier de ce droit au renouvellement mais seulement pour les locaux non sous-loués.
Le sous-locataire peut demander le renouvellement de son bail au locataire principal dans la mesure des droits que ce dernier tient lui-même du propriétaire. En d’autres termes, le locataire principal ne peut pas accorder au sous-locataire un renouvellement pour une durée excédant celle de bon bail principal.
Toutefois, le sous-locataire peut demander le renouvellement directement au propriétaire, à condition que :
- le bail principal soit expiré ;
- le propriétaire ait expressément ou tacitement autorisé ou agréé la sous-location ;
- si la sous-location est partielle, les lieux objet du bail principal ne forment pas un tout indivisible matériellement ou dans la commune intention des parties.
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